Stéphane Champagne | La Presse +
Oeuvrer dans le secteur pharmaceutique, Joël Sirois, PDG de BioIntelligence Technologies, y pensait depuis longtemps. Mais pour une PME comme la sienne, la marche était trop haute. La pandémie de COVID-19 a cependant changé les choses. Des entreprises pharmaceutiques ont récemment cogné à sa porte afin de profiter de son expertise. Survol d’une nouvelle donne pour cet ingénieur chimique et son équipe.
L’expertise de BioIntelligence Technologies sera notamment mise à profit au Centre de production de produits biologiques du Conseil national de recherches du Canada (CNRC), actuellement en construction sur l’avenue Royalmount, à Montréal. C’est là, en 2022, que devrait être fabriqué, par des technologues et des spécialistes montréalais, un vaccin contre la COVID-19.
« La COVID-19 a le potentiel de changer bien des choses, affirme M. Sirois. C’est une occasion unique pour nous. On finalise les contrats. On va commencer à petite échelle, puis augmenter au fur et à mesure. Tout le monde est excité. Cette expérience pourrait changer nos vies. »
Une poignée d’autres pharmas, dont l’entrepreneur préfère taire le nom, ont également pris contact avec la PME québécoise au cours des derniers mois.
Le chef d’entreprise de 48 ans, également professeur à l’Université de Sherbrooke, est très emballé par ce qu’il vit en ce moment.
« C’est très difficile pour une PME d’entrer dans le pharma. Ça coûte cher et ça prend du temps avant que ça rapporte. Normalement, ce devrait être nous qui courons après les pharmaceutiques. Ce sont plutôt elles qui sont venues vers nous. C’est une drôle d’époque. »
— Joël Sirois, ingénieur chimique, fondateur et PDG de BioIntelligence Technologies
BioIntelligence Technologies a conçu et commercialise des instruments de suivi et d’optimisation des bioprocédés qui augmentent la productivité. L’entreprise de Sherbrooke a mis au point une sonde, de même qu’un logiciel, servant à mesurer et à analyser, en temps réel, les ingrédients en biotechnologie industrielle. La sonde est issue d’une technologie développée à l’Université de Sherbrooke.
Les produits de la PME de 13 employés sont principalement utilisés dans des cuves où des micro-organismes servent de base à des produits industriels comme des biofertilisants, des biocarburants, des ingrédients cosmétiques ou des ingrédients pour l’industrie alimentaire.
« Avec nos instruments intelligents, nos clients diminuent leurs pertes de production et la variabilité naturelle des bioprocédés. Ils ne prennent plus d’échantillons et ne contaminent donc plus leurs recettes. Ils augmentent leur productivité et leur efficacité. Notre sonde est unique. Elle est la seule à générer autant d’informations. »
Plus jamais comme avant
Une nouvelle ronde de financement, menée tout juste avant le Grand Confinement, a aidé la PME à passer à travers la crise. Dans la foulée, Joël Sirois a par ailleurs constaté que le télétravail pouvait bien le servir. « On a fait des embauches à Mont-Tremblant, Rimouski et Toronto », souligne le détenteur d’un doctorat en bioprocédés de Polytechnique Montréal.
Ne pouvant plus fonctionner comme avant (commande, livraison, personnalisation et installation sur place par ses équipes), la PME s’est retournée sur un 10 cents. Elle a réussi à améliorer son modèle d’affaires, tout en mettant son énergie à préparer sa collaboration avec les entreprises pharmaceutiques qui l’ont contactée.
« Grâce au financement levé le printemps dernier, mon équipe et moi avons fait en sorte que nos instruments puissent désormais être ship, plug & play. Autrement dit, que nous puissions les faire livrer, installer par le client et qu’ils soient fonctionnels en quelques clics », explique Joël Sirois.
Pour l’heure, BioIntelligence Technologies effectue 85 % de ses ventes aux États-Unis et 15 % au Canada. Outre Joël Sirois, actionnaire principal, l’entreprise est entre autres détenue par Investissement Québec, Real Ventures, l’ACET (Université de Sherbrooke) et une poignée d’anges investisseurs.