La Tribune

Les comédiens Philippe Scrive et Jade Charbonneau collaborent à moozoom.
FOURNIE PAR MOOZOOM

Un entrepreneur investit 200 000 $ dans le développement d’une plateforme multimédia visant à réduire l’anxiété chez les jeunes du primaire en facilitant la régulation de leurs émotions. Cet outil est destiné aux écoles du Québec et il répond aux souhaits du ministère de l’Éducation de remplacer le cours d’éthique et culture religieuse par un cours visant notamment le développement de soi et des relations interpersonnelles.

« Le projet est né d’abord d’inquiétudes personnelles. L’anxiété est un enjeu important dans ma famille. Mais ce projet s’attaque également à un enjeu de société », explique le fondateur de moozoom, Jean-Philippe Turgeon, rappelant que, selon l’Association canadienne pour la santé mentale, entre 10 % à 20 % des jeunes Canadiens sont touchés par une maladie mentale ou un trouble mental. Et seulement 1 enfant sur 5 ayant besoin de services de santé mentale les reçoit.

La plateforme moozoom, qui a été lancée le 16 mars, comprend une websérie interactive de 30 épisodes par année qui favorise l’autodéveloppement des compétences sociales et émotionnelles. L’exercice se veut ludique et pédagogique. Caroline Allard, de Conseils de famille et autrice des Chroniques d’une mère indigne, et Benoit Pelletier, de Conseils de famille et Égo trip, assurent la scénarisation. André Pelletier est le réalisateur de la websérie.

« L’Association des médecins psychiatres du Québec a affirmé publiquement cet automne qu’on devrait enseigner des compétences sociales et émotionnelles aux jeunes et qu’elle souhaite que des cours d’éducation à la santé mentale soient intégrés dans le programme scolaire des écoles dès la maternelle », rappelle M. Turgeon.

Plusieurs jeunes comédiens (Jade Charbonneau, Philippe Scrive) jouent dans la websérie interactive qui traite de différentes thématiques telles que le rejet, la peur de l’échec, l’intimidation, les conflits entre parents, l’estime de soi, l’influence des autres et l’acceptation d’un refus.

« Devant différentes situations, on amène le jeune à identifier quelle émotion est vécue par le personnage et ensuite à choisir parmi les réactions possibles. Se venger, faire semblant de rien ou se défouler par exemple », souligne l’avocat de formation, ajoutant que la plateforme inclut également un vlogue, des capsules d’introduction à la méditation, des quizz, des jeux de rôle, des contenus éditoriaux.

La création de moozoom a été faite en collaboration avec des psychologues, enseignants et parents. Trois constats émergent des consultations. « La régulation des émotions améliore la qualité des relations sociales des enfants et favorise la réussite scolaire; le développement d’habiletés, visant la régulation des émotions, sera optimisé s’il s’effectue au moment où les émotions sont ressenties; et les parents et les enseignants ne disposent pas des ressources nécessaires pour accompagner les enfants à développer efficacement la régulation de leurs émotions », mentionne M. Turgeon.

UN PROJET NÉ DES INQUIÉTUDES D’UN PÈRE

Le père de famille, qui a une personnalité anxieuse et un diagnostic de TDAH, a senti le besoin de s’attaquer à la gestion des émotions après avoir vu souffrir sa fille aînée.

« Ma grande fille qui est rendue à 21 ans souffre d’anxiété généralisée depuis ses 11 ans au moins. L’élément déclencheur a été un grave accident qui a rendu sa mère invalide. Puis à l’âge de 18 ans, elle a vécu une période très noire. Chaque fois que je revenais à la maison, j’avais peur d’avoir perdu ma grande fille pour toujours. C’est infernal comme ça fait mal, ceux qui l’ont vécu le savent », raconte le père de trois enfants.

Lors de cette période, M. Turgeon et son ancienne conjointe, impuissants, se sont demandé pourquoi on n’enseignait pas la gestion des émotions dans les écoles, comme on enseigne les mathématiques et le français. La plateforme moozoom est née de cette réflexion.

Des représentants de l’Institut des troubles d’apprentissage, de la Fondation Jasmin Roy/Sophie Desmarais, du département de psychologie de l’UQAM et du département de sociologie de l’Université de Montréal appuient la démarche.

« L’objectif est tout simple, c’est de créer un outil clé en main pour que les jeunes développent eux-mêmes des habiletés de saine gestion des émotions pour vivre une vie épanouie. On veut que les jeunes puissent arriver à l’école et dire que c’est cool de gérer leurs émotions », résume le Sherbrookois d’origine.

« En janvier, le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge annonçait vouloir abolir le programme d’éthique et culture religieuse et le remplacer par un cours qui, notamment, sera davantage axé sur la connaissance de soi et les relations interpersonnelles. La plateforme moozoom répond à ce besoin. »